En attendant Kodo

Encore rien. Toujours rien. Cela faisait bien huit heures que les brigands attendaient, vaguement camouflés dans l'immensité du désert. La plupart des membres du groupe s'étaient déjà impatientés depuis un bon moment déjà, et l'ambiance commençait à devenir lourde. Mais la raison de cette attente, si elle décidait à se montrer un jour, en vaudrait sans doute la chandelle : un convoi marchand de plusieurs caravanes dont le passage ce jour là avait été communiqué à un membre du groupe par une source plus ou moins sûre.
Peu importait ; le convoi devait transporter un grand nombre d'armes enchantées qu'un grand marchand d'Etheron, un dénommé Vladimir Kodo, espérait sans doute revendre aux quelques caravanes et hameaux qui espéraient se défendre contre les brigands du désert qu'ils trouveraient sur leurs routes. Un butin somme toute courant pour Lawrence ; la revente d'objets enchantés était l'une de ses principales sources de revenus. En effet, il disposait dans ses rangs de deux elfes dont la spécialité était le désenchantement des objets magiques ; ils se débarrassaient ainsi de tout ce qui pouvait être trouvé sur l'objet qui risquait de fournir une preuve de sa provenance illégale et remplaçait celles-ci par un enchantement qui "prouvait" que cette arme était bien la propriété du noble marchand Lawrence Eslaine, et qu'il disposait de tous les droits concernant la vente de ceux-ci sur les marchés.
Ce qui était moins commun, par contre, était que Lawrence connaissait le marchand auquel il allait s'attaquer. Il avait déjà de nombreuses fois commercer sous son identité de marchand avec ce Kodo. Non pas que cela lui rendait plus difficile mentalement la tâche de s'attaquer à cet homme ; la difficulté ici résidait dans le fait qu'il devait se montrer encore plus habile qu'à son habitude à cacher sa présence. Il ne pouvait pas briser sa couverture face à une personne aussi riche d'Etheron, au risque de ne plus pouvoir retourner dans cette ville en tant que marchand pour le restant de ses jours ; et cela risquait fort de perturber le déroulement des chasses à l'homme auxquelles il participait avec son groupe.

Quoi qu'il en soit, le convoi ne se montrait pas. Un empêchement de dernière minute, une erreur sur la date ou l'endroit de la part de l'informateur ou de l'informé, un simple retard, ou peut-être même une info bidon vendue à bas prix, auquel cas il faudrait retrouver le gredin qui les avait trompé afin de lui faire comprendre ce qu'il en coutait ; cela ne changeait rien au fait que le soleil commençait à se coucher sur le désert et que cette journée avait été, pour le dire simplement, gâchée. Il était cependant nécessaire de continuer d'attendre la caravane, dans le doute, pour ne pas rendre vaine cette attente.
Se détournant de l'horizon où rien n'apparaissait, il se tourne vers sa recrue la plus jeune qui semblait tout aussi excitée qu'au début du jour à l'idée de participer à une attaque de cette envergure, et était également la seule à portée de voix sans nécessité de l'élever (les brigands ayant été divisés en groupes et dispersés sur le lieu de l'attaque).

" Ohé, gamin, garde tes forces pour tout à l'heure. Si t'as autant besoin de te défouler, va donc me dénicher une petite bouteille d'alcool, Georges doit en avoir. Et oublies pas de faire profil bas, on sait jamais, ce serait idiot de tout gâcher parce qu'ils aperçoivent une silhouette sur les dunes au moment où ils arrivent. Et dis aussi à Georges de faire gaffe qu'ils soient pas tous bourrés d'ici l'attaque, les connaissant, la moitié doit déjà avoir commencé à tromper l'ennui avec la bouteille. "

La soirée risquait d'être encore longue, et de la compagnie n'était pas de refus, que ce soit celle d'une bouteille ou d'un jeune homme particulièrement motivé pour le travail et n'aspirant qu'à en apprendre davantage sur leur "métier".

Huit heures... Huit heure que le jeune Keith attendait, à l'affut. Il avait des fourmis dans les pieds et les avant-bras à force de rester allongé sur le sable chaud. Dans un ultime essaie de garder du sang dans ses membres, le jeune homme s'était mis à s'agiter dans tous les sens en tentant tout de même de ne pas dépasser au travers des dunes de sables. C'est alors que le chef du groupe s'adressa à lui, lui intimant de se calmer et d'aller au passage chercher une bouteille d'alcool auprès de son second, Georges. La tête blonde n'était pas ce qu'il y avait de plus facile à repérer dans le sable, mais les yeux affutés du jeune brigand n'étais pas dupés par la poussière encore légère qui flottait dans l'air. Avançant gauchement à quatre pattes, luttant contre les fourmies, le garçon alla transmettre le message avant de revenir clopin-clopant sur trois pattes, la quatrième occupée par une bouteille opaque de rhum. Fier de lui, le garçon la tendit à son patron avec un grand sourire. faisant attention à ne pas hausser la voix plus que nécessaire, il fit son compte rendu.

"Ils m'ont dit que c'était une bonne bouteille que vous aviez vous même ramené d'Etheron ! Georges dit que les gars commencent à en avoir marre et demandent à rentrer au bercail. certains sont déjà bien émechés, mais tous sont capable de mener l'attaque à bien... Je pense... Vous pensez vraiment qu'ils vont venir ? Vous avez déjà attendu autant de temps avant ?"

Et oui, sa jeune expérience dans le métier ne lui fournissait pas assez de renseignements. Seul son sauveur était à même de répondre à ses questions. Après tout, c'était bien pour ça qu'il était le boss !

Lawrence regarda pendant une simple seconde le jeunot commencer à s'éloigner avant de reporter son attention vers l'horizon du désert. L'obscurité commençait réellement à recouvrir les dunes, et il devenait de moins en moins probable que le convoi se montre. Kodo et son escorte n'allait sans doute pas prendre le risque de voyager de nuit, retard ou non. Même si les caravanes étaient bien parties et étaient en chemin, une fois la nuit tombé, il était illusoire de penser qu'il était encore utile de l'attendre davantage. Le plus judicieux dans ce cas, pour le butin, aurait été de passer la nuit sur les lieux afin de recommencer leur attente au petit matin. Mais ses hommes risquaient fort de ne pas être motivés à prolonger leur attente, et le retour de la nouvelle recrue, une bouteille sous le bras, lui confirma ses craintes. Prenant la bouteille de rhum, il en but une gorgée au goulot avant de la passer au jeune garçon en lui répondant.

" L'une des bouteilles les plus fameuses de la ville, en effet. Pas ma préférée, mais de la qualité, sans aucun doute. "

Se retournant vers l'horizon qui était de moins en moins perceptible, il prit un air songeur, et ses sourcils se froncèrent à la manière d'un homme qui réfléchit à ce qu'il convient de faire.

" S'ils continuent de râler, je suis sûr que Georges trouvera un moyen de les convaincre de patienter davantage. Ce convoi, c'est pas de la petite marchandise... S'il arrive, ce sera un gros coup. Mais même l'appât du gain ne peut soutenir éternellement un homme fatigué. Une fois, on a attendu comme ça, pour un gros coup, pendant un moment. Quatre jours. Bien avant que tu sois des nôtres. Le convoi n'est jamais arrivé. A la fin, les hommes étaient a bout de nerfs, à la limite de s'entretuer. Il a fallu qu'on s'y mette à deux, avec Georges, pour réussir à les calmer. Je peux te dire que je recommencerai pas une expérience pareille. Le souvenir de cette fois là risque d'être encore vif après cette attente, ils doivent redouter que la même chose se produise... A bien y réfléchir, je crois qu'il ne serait pas judicieux d'attendre jusqu'a demain dans leur état. "

Tendant la main vers Keith, il fit un signe de tête en direction de la dune voisine, comme s'il lui montrait sa prochaine destination.

" Tiens, passe moi la bouteille et vas dire à Georges de transmettre ça aux hommes. On va attendre encore un peu après que la nuit soit tombée, et on rentrera. Le coup est risqué de toute façon. "

Malgré la manière posée dont il avait parlé, on pouvoir voir sur son visage que la fin de sa phrase apparaissait, même pour lui, comme une fausse excuse pour cacher sa déception.

Le petit brigand du désert écoutait avec une attention toute enfantine les dires de son mentor. Il avait vécu tant de choses, connu tant de situations... Et malgré sa vie fort occupée, l'âge ne se voyait que dans ses anecdotes fructifiantes. Buvant prudemment au goulot, davantage pour ne pas se ridiculiser devant son modèle que pour le goût écoeurant du rhum, il acquieçait à chaque fin de phrase pour signaler qu'il enregistrait bien tout. Après avoir assimilé les ordres, il rendit l'alcoll à Lawrence et, prenant congé d'un sourire franc, retourna faire passer le message aux autres. Il était conscient que son rôle n'était pas très important voire dégradant selon certains, mais il était content de pouvoir simplement rendre service à son chef.
Le chemin du retour paraissait cependant moins paisible que les trajets précédents. Les traits habituellement joyeux de Keith paraissaient effrayés. On sentait qu'il concentrait toute sa volonté pour ne pas se redresser et courir librement. Une fois arrivé, sa voix avait perdu de son calme et certaines syllabes étaient trop fortes pour la discretion dont ils devaient faire preuve.

"Lawrence, ça va mal ! Une baston a éclaté au camp derrière Georges ! Il a du se déplacer en personne et en a assomé un, l'autre saigne de la lèvre et du nez, les elfes tentent de le soigner ! Dans la bagarre, Georges s'est pris un coup de poignard dans le bras gauche, on craint une infection ! Le reste du groupe est calmé par contre... Je sais pas ce que Georges leur a fait mais c'est des brebis maintenant ! Il faut faire quoi mainetant ? Je sais que vous tenez beaucoup à Georges mais j'ai quand même transmis les ordres. Je leur ait dit que je reviendrai aussi vite pour les mettre au courant si les directives changeaient !"

Sa voix étaient précipitée, il tremblait des mains et des genoux, sa respiration était chaotique et ses yeux cherchaient en Lawrence la protection et l'autorité d'un père. Il ne doutait pas de son chef, il règlerait la situation rapidement.

Au moment où il aperçut le jeune homme revenir vers leur position, il sût que quelque chose allait mal. Lorsqu'il put enfin voir son visage, ses soupçons ne firent qu'empirer, et lorsque celui-ci se mit à parler, il sut immédiatement qu'il allait y avoir un changement de plan. Ses brefs espoirs que l'un des siens ait apeçu la caravane furent détruits dès lors que l'expression du visage de Keith lui était apparut, et bien qu'il continuait de jeter de temps à autres des coups d'oeil vers l'horizon tout en l'écoutant parler afin de vérifier que le convoi n'ait pas choisi ce mauvais moment pour se montrer, il savait que cette attente allait sans doute prendre fin ici.

" Pas la peine de continuer en partant sur cette lancée... On abandonne tout. On va rejoindre le groupe et on plie bagages. On ne peut pas se permettre de recevoir nos amis dans ces conditions. "

Ramassant son sac d'un geste rapide, il prit la bouteille dans ses mains et la tendit à Keith afin qu'il la porte avant de lui adresser un sourire qui se voulait encourageant au vu de l'état du jeune homme.

" Bah, ne t'inquiètes pas, il fallait le voir venir. On en a vu d'autres, les gars ont le sang chaud. Bon, c'est pas souvent que ça en arrive au poignard, mais on en est pas à la mutinerie. Et puis tu as vu, quelques mots de Georges et ils sont de nouveau doux comme des agneaux. Qu'est ce qu'on ferait sans lui, hein ? "

Lawrence tenta de cacher du mieux qu'il put l'étrange ton d'ironie qui transparaissait dans sa dernière phrase, puis fit signe à Keith de le suivre. Une fois arrivés au poste de Georges, il s'adressa à celui-ci sur un ton résigné et légèrement moqueur.

" La prochaine fois, toutes les caisses d'alcool restent avec moi. Comment vas ton bras ? Et les deux autres têtes brulées ? Pas la peine de continuer comme ça, reste plus qu'à se retirer. Pour une heure, ça changera pas grand chose, au rythme où ça va. "

Dépité, le jeunot fixait son mentor avec une ferveur farouche. Il avait des paroles sages et tenait à ses amis. Il était vraiment le meilleur chef qu'il puisse rêver. Mais il n'en attendait pas moins de celui qui lui avait sauvé la mise dans ce même désert, le trainant à une oasis alors que les djiins de Delebois soufflaient en rafale, obstruant les voies respiratoires du petit homme.
Suivant Lawrence comme son ombre, ils rejoignirent rapidement le campement de Georges. Ce denier était au centre de l'agitation. Le plus petit des elfes allait et venait entre les deux camps, sans cesse plus chargé à chaque voyage. Quatre bandits avaient ôté leur cape et s'en servaient comme rempart entre le sable et leur Second-en-chef. Une femme était penchée sous les capes et semblait se disputer avec le blessé. Lorsque Lawrence approcha, elle se détourna vivement avec un air blasé. Georges accueillit son ami après que celui-ci eut dit ce qu'il avait à dire.

"On s'en souviendra aussi de cette chasse. La prochaine fois qu'on entend son nom on l'enterre cet enfoiré de Kodo ! T'inquiète pas, le sable fait plus peur que la plaie, mais je refuse que l'autre dingue gache du rhum pour "désinffecter". Les deux autres vont bien, ils sont aux mains de ceux qui savent à peu près soigner. T'en fais pas, abandonne pas cette prise pour si peu, je vais partir avec les deux autres et un des elfes à l'oasis la plus proche. On vous attendra là-bas. Si le convoi décide de camper à l'entrée du désert, je préfère qu'on les choppe pendant la nuit. Keith a de bon yeux, il te dira si ya espoir ou pas."

Ca avait toujours marché comme ça entre eux. Une confiance mutuelle à toute épreuve, une fraternité dont on ne pouvait douter. Le statut de chef variait entre eux selon la mission à effectuer, et cela leur allait bien.

A première vue, le second était plutôt confiant quant à la suite des opérations. Il n'avait pas encore perdu espoir de voir apparaitre le convoi, et cela était plutôt rassurant, bien que Lawrence ne partageait pas vraiment le même avis. Malgré ses dires face au jeune Keith, cette situation aurait très bien pu dégénérer, et sans Georges à ses cotés, elle risquait fort d'en arriver à des conséquences bien plus extrêmes si elle se reproduisait. Malgré cela, après un instant de réflexion, il finit par soupirer avant de répondre :

" Si c'est ce que tu penses. Dans ce cas, on va profiter de l'obscurité et du sable qui à l'air de se lever pour avancer directement sur leur trajet... S'ils se sont arrêtés, vaut mieux effectivement aller directement à leur rencontre. On va aller jusqu'à la limite ouest, si Keith peut pas les voir à l'horizon de là bas, alors je partirai du principe que le convoi n'est jamais parti. Et même s'il est trop loin pour qu'on l'attaque en dehors du désert, ça devrait remonter le moral des gars. On se retrouve avant le matin, donc. Faites attention à pas vous faire prendre dans la tempête. Keith, avec moi. "

S'éloignant du petit camp de fortune organisé autour de Georges après avoir fait un signe de la main à celui-ci, Lawrence se dirigea vers le reste des troupes afin de leur expliquer la suite des opérations. Après avoir réussi à rassurer les plus inquiets des membres sur l'état de leur compagnon blessé, leur avoir rappelé que la cohésion de leur groupe était un point crucial pour leur "métier", et leur avoir interdit la boisson pour le reste du voyage, il leur indiqua que cette "petite ballade" allait marquer la fin de cette attente. La plupart des brigands virent cette annonce d'un bon oeil, et Lawrence pensa que cela allait sans doute limiter les débordements le temps de l'attaque si celle-ci devait avoir lieu, puis de rejoindre Georges. Tandis que ses compagnons se préparaient, Lawrence commença également à rassembler ses affaires légères, prêts à partir, avant de se retourner vers Keith.

" Alors, gamin, ça va faire un moment qu'on me vante ta vue, c'est le moment de me le prouver. J'aimerai éviter de trop m'éloigner du centre du désert en pleine nuit, alors on va essayer de se rapprocher le plus possible des plaines sans trop en faire. Si tout va comme je veux, on n'ira pas assez loin pour nous apercevions les plaines ; mais toi, je m'attends à ce que tu les vois à travers l'obscurité et le sable. Alors, gamin, tu crois pouvoir braver la nuit et le désert en même temps ? "

Sur ordre de Lawrence, le jeune Keith retournait à laventure en éclaireur afin de localiser au plus vite la caravane à attaquer. Vu l'importance du coup, il devrait y avoir au moins trois charettes et une vingtaine d'hommes. Le temps calme et la nuit permettraient à Keith de voir au loin si un campement avait pris place. Les feux de camps restaient allumés souvent pendant la nuit et serviraient sûrement de repère au loin. Lawrence avait besoin de lui et de sa vue, alors il donnerait le meilleur de lui même dans cette expédition ! Un grand sourire se forma sur son visage lorsqu'il répondit, la main sur la tempe en parodie de l'armée de Vénarie.

"Oui monsieur ! Même si je ne connais pas exactement les reliefs du désert, je connais le ciel mieux que ma poche ! Les nuages sont souvent les pires traitres des campements ! Je cherchera normalement jusqu'à ce qu'il fasse sombre, je vous ferai alors pleinement profiter de mes yeux !"

On pouvait presque voir les yeux du jeune homme briller dans le couché de soleil dans une naiserie purement natuelle. Le désert était à présent une vaste étendue orangée du sable au ciel.
Il ne fallut pour autant pas longtemps avant qu'une trace de caravane se fasse voir, malheureusement pas là où on l'attendait. A moitié entrerré, une carcasse de chariot plein se languissait. Un bras un peu plus loin laissa supposer ce qu'il était advenu du reste de la caravane.

"Lawrence... Je ne sais pas si c'est la caravane de Kodo, mais il y a un type qui s'est planté en pensant trouver un raccourci à Delebois... On fait quoi ?"

Il ne s'agissait effectivement pas de la caravane de Kodo. Du moins, pas entière. Le groupe avait du subir une mutinerie, cinq individus avaient décidé de quitter les sentiers "communs" de Delebois pour fausser leurs compagnons et partir avec leur marchandise. Les djiins avaient fini le boulot. Il n'y a de richesse que le désert ne peut s'approprier...

Il ne fallut pas longtemps a Keith pour repérer quelque chose une fois à portée de sa vue perçante. Cependant, ce qu'il vit n'était sans doute pas ce que le groupe s'attendait à trouver en partant à la recherche du convoi de Kodo. Réfléchissant quelques instants tandis que quelques uns de ses hommes commentaient déjà le malheur qui s'était abattu sur cette caravane, malheur qui n'était pas si rares en ces lieux pour les téméraires, il finit par s'adresse sur un ton calme et prudent au reste du groupe.

" Je ne sais pas si elle appartenait à Kodo, mais on va quand même aller voir ce qui est récupérable. On fait comme d'habitude, on avance en prudence, on sait jamais, ça peut être un piège. Et nous ne voudrions pas faire peur à un autre groupe fouillant déjà notre prise, n'est-ce pas ? "

Souriant à ses hommes à la suite de cette phrase ironique, il se tourna vers Keith, lui mit une main sur l'épaule et lui parla sur un ton plus bas, presque semblable à un murmure.

" Reste sur tes gardes et garde les yeux bien ouverts. "

Lentement, mais sûrement, le groupe commença à se diriger vers le convoi ensablé, tels des ombres imperceptibles sur le sol du désert. Une fois arrivés sur le lieu du "désastre", Lawrence laissa une petite partie du groupe commençait à explorer les décombres en éclaireur, tandis qu'il restait avec l'autre moitié, Keith compris, à une certaine distance, pouvant agir par surprise si des agresseurs en faisaient de même pour le reste du groupe. Non loin d'eux, le bras d'une victime dépassait de sous le sable, inerte. Souriant à Keith d'un air légèrement moqueur, il s'adressa cependant à lui sur un ton dont transpirait davantage un certain remerciement à la clémence du désert :

" Regarde moi ça... Ca a failli être toi. Qui sais combien de corps sont encore enfouis sous nos pieds en ce moment même. "

Le petit groupe s'activait donc pour fouiller les restes de la caravane. Le butin n'était pas à la hauteur de ce qui avait été annoncé, mais la prise avait été moins risquée quoique pas moins fatigante.
La moitié du charriot contenait des étoffes en tissu léger, quelques armes et armures légères, tandis que l'autre partie était un véritable garde manger : viande séchée, fruits secs, alcool, eau pure, herbes à assaisonnement, rien n'avait été oublié par le convoi. Si ces derniers pensaient que la faim était la seule chose à craindre dans le désert, ils l'avaient payé de leur vie.
Malheureusement, la cariole était bien embourbée et il faudrait trouver un moyen de palier à ce soucis si le groupe désirait repartir avec les poches pleines.

Dans le ciel, la nuit était là, la fraicheur des nuits qui allaient avec ne manquaient pas non plus au rendez vous. Alors que Keith proposait de reprendre la route pour débusquer le reste de la caravane mutilée, Georges attendait à l'oasis l'ombre de ses compagnons.

A première vue, le convoi n'était pas vide, bien que d'après les dires de ses hommes, la marchandise laissait tout de même à désirer comparée à celle qui avait été attendue la journée durant. Qu'importe ; le reste de la caravane s'il existait encore, avait sans doute déjà fait marche arrière. S'approchant du convoi ensablé au vu de l'absence de danger après avoir fait signe aux hommes restés avec lui de le suivre, il inspecta rapidement ce qui était encore récupérable et s'adressa aux hommes.

" On laisse les périssables ; les doués en magie, vérifiez la présence d'enchantements sur les objets, et ramassez en priorité ce qui en ont, on s'en débarrassera plus tard. Ramassez les étoffes encore en bon état, ça devrait valoir cher. Prenez aussi tout ce qui est apparent de loin, ainsi nos rivaux penseront que le convoi à déjà été vidé entièrement. Je ne pense pas que nous ferons plus d'un voyage cette nuit, mais nous tenterons de revenir demain ; si la ruse aura marché, on prendre le reste, sinon, tant pis, on aura gardé le gros du lot. "

Malgré l'ensablement d'une grande partie des caravanes, autant tenter de récupérer tout ce qui pouvait l'être. Tenter de déplacer le convoi était sans doute inutile, ils se contenteraient donc de ce qui leur été donné. Au final, l'attente n'avait pas été vaine, et c'est tout ce qui comptait. En un autre endroit du désert, leurs compagnons les attendaient sous la protection d'une oasis, et il valait mieux ne pas les faire attendre trop longtemps, surtout au vu des conditions de leur séparation.
Une fois que les solides gaillards du groupe eurent rassemblés tout le butin qu'ils pouvaient, et que Lawrence lui-même eut rassemblé pour les transporter un certain nombre d'étoffes légères, ils étaient prêt à se mettre en route vers le point de rendez-vous. Se tournant encore une fois vers la jeune recrue au regard acéré, à laquelle il avait demandé de ne rien porter, il lui parla doucement :

" Pas mal, j'avoue. Mais maintenant, il va te falloir redoubler d'efforts. Nous allons avancer lentement, alors je veux que tu passes ton temps à vérifier qu'aucune menace ne nous approche, que ce soit à l'ouest, à l'est, au sud ou au nord, devant ou derrière nous. N'hésites pas à faire marcher tes jambes en plus de tes yeux pour que ce soit plus facile ; t'es pas privé de charges parce que t'es gentil, d'accord ? Je compte sur toi. "

Faisant un signe de la main au reste des troupes, ils se dirigèrent finalement vers l'oasis ou Georges les attendait, en compagnie des autres hommes ne les ayant pas accompagnés.

Chargés comme des mules, les membres du groupe de Lawrence avançaient selon le commandement de leur chef. Suivant les directives qui lui avaient été assignées, Keith allait et venait en trottinant dans le sable, rapidement essoufflé malgré la fraicheur ambiante. Au bout de quelques minutes, le garçon partit en courant dans les entrailles du désert, apparemment sur une piste. Avant d'être hors de portée, il prévint son chef de ce que sa vue lui avait apporté.

"Lawrence, il y a un truc là bas, je sais pas c'est quoi mais je vais vérifier rapidement si c'est intéressant !"

Finalement ça ne l'était pas. Un cactus. Voilà le pire ennemi des paranos du désert. Même hauteur qu'un homme, souvent doté d'un bras trompeur ou d'un chapeau sordide, il n'était pas rare qu'on prenne ces jolies plantes pour de vilaines personnes. Déçu de revenir bredouille, le jeune homme traina la patte sur le chemin du retour. Lorsqu'il rattrapa la caravane, il annonça sa déception. Le trajet jusqu'à l'oasis se fit sans encombre. A leur arrivée, Georges les accueillit avec entrain.

"Alors les aventuriers, je vois que la pêche a été bonne finalement ! Vous avez réussi à avoir toute la caravane ? Il faut refaire un aller-retour ? Je peux vous renvoyer les deux ididots si vous avez besoin, ils se sont presque calmés. Y a quoi de beau dans ce butin ?"

Sur ses ordres, les arms et étoffes s'enfoncèrent dans le sable, soulevant une importante couche de poussière. Dans leur coin, les deux elfes commençaient déjà leur travail de désanchantement.

Spoiler:

Finalement, après toutes les mauvaises surprises qu'avait apportée cette journée, la fortune semblait se montrer plus clémente avec les brigands épuisés. Après avoir finalement obtenu une partie du butin tant convoité, le trajet retour se déroula sans aucune accroche, et c'est avec une joie assez peu dissimulée que le groupe parvint à l'oasis ou les attendaient Georges et les deux trouble-fêtes. Trouble-fêtes qui, a première vue, semblaient commencer à regagner leur calme. Que cela soit dû à la fraicheur de la nuit, au fait d'avoir désaoulé ou à la présence plus ou moins intimidante de Georges, le fait était là et était appréciable.
Souriant d'un air moqueur à Georges, Lawrence inspecta rapidement l'état des marchandises après le voyage retour donna de rapides instructions aux hommes tout en lui répondant.

" On ira voir ça demain. J'ai essayé de faire en sorte que la caravane paraisse déjà pillée, normalement on ne devrait pas avoir de concurrence entre temps. Des armes et des étoffes, principalement. Il y a avait aussi des denrées et de l'alcool, mais j'ai laissé ça pour le prochain voyage. Bien que je ne doute pas qu'un ou deux nos chers compagnons ait pris soin de récupérer une petite bouteille sous son châle, n'est-ce pas ? "

Se tournant vers le reste du groupe, un sourire légèrement teinté de reproches sur son visage, il fit un rapide tour de l'assemblée avec son regard, remarquant les quelques visages qui avait sourit de culpabilité à son annonce, avant de se retourner de nouveau vers Georges et les deux hommes qui avaient provoqués sa blessure. Après un petit rire moqueur, il s'adressa à eux avec un ton mélant l'amusement et la réprimande.

" Après avoir vu ce qu'il s'est passé après un peu trop d'exposition à l'alcool et au soleil tout à l'heure, on aurait pu croire que la leçon avait été acquise, non ? Il faudra essayer de se discipliner un peu de ce coté là. "

Après avoir bu plus qu’il n’est conseillé, Petr ne se sentait pas très bien. Le désert commençait à tanguer et son esprit à divaguer. Il n’avait pas prédit que son compagnon de beuverie allait l’enserrer. Sa réaction bien que latente du à la dose d’alcool qu’il avait ingurgité, fut aussi imposante qu’imprévisible, son poing parti et ils se retrouvèrent tout deux à lutter dans le sable chaud. Passé un certain moment on les sépara. Cette lutte effrénée aida nos compères à récupérer leurs esprits. Petr ne pu s’empêcher de rougir de ce qu’il venait de faire, lui au comportement si timide venait de se ruer sur un individu dont le nom ne lui revenait même pas… En plein remord il comprit que c’était Georges, ce type qui suivait Lawrence comme un chien et a qui il devait obéir à l’aveugle, qui venait de les séparer. Cette pensée, et le reste de l’alcool dont les effets n’étaient pas complètement dissipés, fit monter en lui une colère insoupçonnée. Il saisit un coutelas qui se trouvait à sa portée et se jeta sur Georges, qui réussi à esquiver son attaque sans pour autant s’en sortir indemne. Suite à cette attaque il fut rapidement maîtrisé, et fut rejeté à coté de l’autre alcoolique. Blessés tout les deux, il ne se sentait pas de reprendre leur dispute là où ils l’avaient laissé. Et voyant tout ces gens s’affairés autour d’eux pour les soigner il se dit qu’il pourrait faire un petit somme sans que personne ne le remarque. De retour à l'oasis c'est ce qu'il fit. Il se réveilla lorsqu’il entendit un bruit étrange. Etourdit il ne réagit pas à l’approche de la caravane. Lorsqu’il comprit que Lawrence et les autres étaient rentrés il tenta tant bien que mal de se ressaisir et de jouer le rôle du repenti. Encore un jour où il allait devoir être de corvée… Il se releva en chancelant se dirigea vers Georges, histoire de faire bonne figure. Il s’adressa à lui avec le peu de dignité qui lui restait.

" Je m’excuse pour ce petit malencontreux incident… "

Sujet: Re: En attendant Kodo Jeu 10 Mar 2011 - 22:06

En voyant son compagnon s'excuser de sa conduite, Lawrence ne put réprimer un sourire. Cette journée fut lourde, non physiquement mais mentalement, et c'était également son erreur d'avoir permit à ses subordonnées de disposer de l'alcool durant leur attente. Au final, celui-ci ne les aura pas véritablement aidé à supporter davantage leur situation ; loin de là.

" Nous ne t'en tiendrons pas rigueur Petr, ni à toi ni à ton compagnon de rixe. J'espère juste que cette situation ne se reproduira plus ; cela aurait pu finir bien plus mal. Notre pauvre Georges aurait pu y perdre son bras ! "

Emettant un léger ricanement à l'attention de Georges, Lawrence se retourna vers celui-ci en lui souriant, avant de reporter son attention sur Petr. Bien que le dénouement était plus ou moins heureux, il ne voulait pas risquer de faire comprendre qu'il considérait les batailles internes comme acceptables.

" Petr, tu participeras au voyage de demain. Il reste encore beaucoup de choses à prendre, et j'espère pouvoir compter sur les... inactifs d'aujourd'hui pour nous montrer qu'ils ont leur place en notre sein. Essaie d'être frais d'ici là, d'accord ? La nuit risque d'être courte, mais j'espère que vous avez bien profiter de cette occasion pour vous reposer. Nous ne pouvons pas risquer de laisser le reste de la caravane à nos rivaux. "

Après réflexion, cette façon de dire les choses n'était pas beaucoup mieux. Tout ce qu'il espérait, c'était que Petr n'avait pas pris cette remarque trop sérieusement ; il n'avait aucune envie de le faire se sentir indésirable, loin de là. Au yeux de Lawrence, malgré leurs défauts, les hommes ici présents était "l'élite" des hommes qu'il pouvait espérer, et aucun d'entre eux n'était remplaçable.